Je questionne la relation à l’autre, l’attachement et l’autoreprésentation, d’un angle sociologique. À travers mes œuvres picturales, je tente de partager mon rapport à l’intime. Mes explorations m’amènent à identifier les échanges entre les individus que je côtoie. C’est ce moment, cette rencontre avec l’autre, qui est au cœur de ma pratique. Aussi, mes lectures et écrits reflètent mon besoin de concevoir le lien social comme une manière de comprendre l’autre.

Conceptuelles et documentaires, mes recherchent positionnent l’individu comme un médium créateur — matière première de mes œuvres — et également comme un sujet d’observation. Ce sont ces rencontres qui me font cheminer vers mes œuvres et qui ne pourraient pas exister sans elles. En photographiant, filmant, écrivant, j’élabore ainsi les mises en scène quotidiennes et spontanées qui se retrouvent aussi dans mes tableaux. Mes peintures torturées font figure d’introspection par l’autoreprésentation que je soumets à l’œil du spectateur, fil rouge liant toutes mes créations.

Par exemple, le diptyque Les Inconscients (2019) est composé de portraits de mes parents endormis. Voyeur, on se retrouve alors devant la fragilité des corps. Travaillant la matière picturale à la fois par transparence et empâtements, ma gestuelle semble contradictoire. Cette opposition accentue davantage la tension exercée sur mes sujets. Je n'hésite pas à froisser mon canevas, à déformer la réalité et à jouer d'imperfections. Je m'éloigne, de cette manière, du côté documentaire de la photographie pour me rapprocher de l'intangible, de l'introspection et de l'impression sensible. Comme un miroir sur soi, les relations humaines et les banalités quotidiennes se chevauchent pour offrir des compositions marquées par une réflexion sur l’importance d’observer.

Inspirée par Prenez soin de vous (2007) de l’artiste Sophie Calle, je tente de faire mon deuil de certains échanges malheureux, mais également d’illustrer les tensions et les effets de ceux-ci. Aussi, je vois des filiations, dans l’idée d’une certaine intimité, avec les œuvres photographiques de Nan Goldin ou les peintures défigurées de Francis Bacon. Les nombreuses performances en duo de Marina Abramovic et Ulay m’inspirent également. De plus, la fine ligne entre réalité et fiction des installations d’Agnès Geoffray fait écho à mon désir de jouer avec mes propres mises en scènes.